Haiti-Vodou: Le bicentenaire du Lakou Souvenance fêté sans le soutien de l’Etat haïtien


Le Péristyle 
Lakou souvenance, une division du Dahomey (actuel Bénin), est l’un des hauts lieux mystiques d’Haïti. Sa renommée dépasse les frontières. Les 18, 19 et 20 septembre 2015, ce lakou a fêté ses deux cent ans d’existence. A l’exception des autorités étatiques, des « pitit fèy (initiés) », des chercheurs et des vodouisants venus de toute part ont salué la mémoire des « anciens » qui ont consacré cet espace au culte du vodou.


Les dignitaires de l’Etat, dixit le serviteur du Lakou, M. Jean-Georges Ferdinand Bien-Aimé, ont été officiellement invités à l’évènement. A la surprise générale, ils ne se sont pas présentés. Pas même une note d’excuses ou de justification. Le serviteur a critiqué énergiquement cette attitude qu’il assimile à la banalisation du vodou. En réponse, il a décidé de frapper fort. «Les autorités n’accordent pas d’importance au Lakou. Nous allons prendre une résolution pour empêcher l’Etat haïtien de se servir du site comme patrimoine», a-t-il lâché d’un ton sérieux. 

Anthony Pascal, dit Konpè Filo, avoue également ne pas apprécier la manière de commémorer le bicentenaire du Lakou. «C’est une honte !», a-t-il lâché. De l’avis de ce vodouisant, les forces vives du pays devraient se joindre aux organisateurs pour rehausser l’éclat de cet évènement.

Le cinéaste Mathieu Painvier a abondé dans le même sens. «L’élite du pays se détache de son patrimoine», a-t-il regretté. Selon lui, c’est l’une des principales faiblesses d’Haïti. «Malgré la négligence étatique, les lakou poursuivront leur mission. Ceci jusqu’à l’élection d’un chef responsable, impartial et sans préjugés», a déclaré M. Painvier.  

Des projets pour ce bicentenaire

Jean Georges Ferdinand Bien-Aimé a beaucoup de projets en tête. Le plus grand, a-t-il révélé, est de créer une forêt sacrée sur un demi-carreau de terre. Cette idée est venue après un voyage au Bénin (Afrique). «Au Bénin, les serviteurs n’utilisent pas les carrefours pour faire des expéditions. Ils se servent des branches d’arbres d’une foret sacrée», a indiqué le serviteur. M. Bien-Aimé souhaite dupliquer cette formule pour une meilleure protection de l’environnement.

Ensuite, il y a la clôture du lakou. La façade principale est déjà réalisée. Il reste encore les trois autres parties du périmètre. La construction d’un village et d’une maison d’accueil figurent également sur la liste des priorités du serviteur.

Survol historique du Lakou

Lakou souvenance a été fondé en 1815 par Jean-Baptiste Bois, appelé affectivement «Papa Bois». A sa mort, Archélus Bois, son fils, a pris la relève. Fédélien est le troisième serviteur du Lakou. Il a rempli cette fonction pendant toute l’occupation américaine. Après sa transition, l’espace a été fermé à cause de la « Campagne des rejetés » initiée par l’église catholique pour persécuter les vodouisants. En 1940, Bien-Aimé Fils, dit Ati Bien-Aimé, a pris les rênes du lakou. Après 50 ans de service, en 1990, à l’âge de 94 ans, il a traversé. Et, depuis lors, c’est son fils Jean Georges Ferdinand Bien-Aimé qui s’occupe de cet héritage ancestral.


J.C

Commentaires