Les obsèques de l’ancien opposant au régime de
Duvalier, Jean Pierre, alias Jean Tatoune, ont été célébrées aux Gonaïves, le
samedi 7 octobre 2017. De nombreuses personnes, dont des proches, des autorités
locales et des anciens camarades de lutte ont rendu un dernier hommage au
militant.
Ces funérailles qui ont été déjà reportées,
apparemment, n’ont pas été planifiées. Prévue à 8h a.m., la cérémonie a
finalement démarré aux environs de 10h 30. Aucun programme. Aucun protocole.
Les partisans accusent les responsables. Le délégué de ville de Raboteau,
Wilfrid Darius, la seule autorité à prendre la parole en la circonstance, n’a
pas caché sa déception. Il s’est élevé contre les autorités centrales et
certains politiciens qui, a-t-il estimé, ont banalisé la mémoire du leader. «
Jean Tatoune est un révolutionnaire. S’il n’avait pas accepté de se sacrifier,
le pays serait encore sous le joug de la dictature », a lâché M. Darius.
L’ancien chef du Front de résistance de l’Artibonite
(FRA), Wilfort Ferdinand, dit Ti Wil, a salué le départ de son devancier. Il
s’est dit fier d’avoir combattu aux côtés de Jean Tatoune, lors de
l’insurrection anti-Aristide. De l’avis de ce militant, « la bataille politique
a pris fin mais la révolution sociale et économique se poursuit ». Corps et
âme, l’activiste déclare s’engager dans la lutte pour l’intégration des jeunes
de la cité.
Depuis la révolte anti-Aristide, en février 2004,
l’insurgé s’était réfugié au quartier populaire de Jubilé. Dans cette banlieue,
il vivait dans la gêne. Il ne pouvait même pas répondre à ses obligations
familiales. Son ancien camarade de lutte, M. Louis Jodel Chamblain, a indiqué
que Jean Tatoune n’avait eu aucune assistance sociale. « Jean Tatoune me
parlait tout le temps. C’est la misère qui l’a tué! », a-t-il regretté.
L’ancien militaire appelle les autorités à cesser «l’hypocrisie » pour bâtir
une société inclusive.
Neil Latortue, maire des Gonaïves, Herby Dalencourt,
délégué départemental de l’Artibonite et l’ancien candidat à la présidence, M.
Eric Jean-Baptiste, ont assisté aux funérailles. A la fin de la cérémonie, une
manifestation spontanée a été organisée par les sympathisants pour dénoncer
l’attitude des autorités. Avec le cercueil, les protestataires ont parcouru
diverses rues de la ville avant d’enterrer le cadavre.
Jean Tatoune est mort à la suite d’une hypertension,
au Centre de diagnostic intégral (CDI) de Raboteau, le 14 septembre 2017, à
l’âge de soixante ans. Il a laissé vingt-quatre enfants. Dans les annales de
l’histoire, il est considéré comme l’un des principaux leaders du mouvement
anti-Duvalier dans le pays. Entre 1983 et 1986, il a entrepris une série de
protestations ayant conduit en février 1986 à la chute de Jean-Claude Duvalier,
président à vie d’alors.
Evadé de la prison civile des Gonaïves où il a été
écroué pour son implication dans le massacre de Raboteau, en 2003, il a rejoint
l’Armée cannibale qui sera rebaptisée Front de résistance de l’Artibonite. Avec
ce groupe, il a combattu les « exactions » de l’administration
Aristide-Neptune.
JC/Le Nouvelliste
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