Gonaïves : Raboteau s’isole et passe en mode défensif

 



Raboteau, quartier populaire des Gonaïves, est totalement enclavé. Loin de baisser les bras, jour et nuit, les opposants au pouvoir y montent la garde. S'appuyant sur l’ensemble des moyens dont ils disposent, ces activistes renouvellent leur engagement de faire échec à toute intervention irrégulière dans la zone.  

À l’approche du 7 février 2021, date à laquelle plusieurs secteurs fixent l’échéance du mandat de Jovenel Moïse, les insurgés de Raboteau renforcent leur sécurité. Des barricades de pierres et des poteaux métalliques obstruent toutes les rues qui mènent à ce quartier. Les résidents qui n’ont pas fui se montrent plus ou moins rassurés. En dépit du calme qui y règne, Raboteau s'apparente à un baril de poudre. Vu sa configuration, la moindre étincelle pourrait causer des dommages collatéraux. 

Atteindre Raboteau exige du courage. Dès l’entrée, des vigiles- peu remarquables - vous dévisagent de leurs regards et sont prêts à agir ou contre-attaquer. À la rue Paul Prompt, à quelques mètres de la tombe de l’ancien activiste Lavalas Amiot Métayer (Cubain), des militants discutent tranquillement de leur plan de bataille. Leur plus grand challenge : affronter les « faux policiers (ceux qui souhaiteraient mater le soulèvement) » et saisir les blindés.  

L’ancien membre du front anti-Aristide Winter Etienne s’érige en stratège. Il indique que ses camarades de lutte ont assez de moyens d'affronter tous ceux qui décident de décimer la population. « Nou pare menm pou fè lagè avèk Etazini », a déclaré l’activiste. Il n’a pas mâché ses mots pour dénoncer les  « exactions » des forces de l’ordre. Il en a profité pour inviter le directeur départemental de la police, Jacques Ader, à respecter les règles du jeu. « Ader est le fondateur de la Baz Pilate. Il doit déposer les blindés, se placer à la tête de ses troupes et venir nous affronter », a-t-il renchéri. 

Partant de Raboteau, toutes les voies menant au palais de justice et au commissariat de police, dont les rues Vernet, Lamartinière, Fabre Geffrard, Christophe et Toussaint Louverture, sont minutieusement surveillées. Dans ce périmètre, des agents bien équipés scrutent l’ouest et le sud de la ville où proviendraient d'éventuelles attaques. Ils sont postés sur des galeries, contre des poteaux en béton ou des murs qui leur servent de rempart. Certaines fois, au moyen des blindés, des patrouilles sont tenues dans les parages de Raboteau. 

Depuis la nouvelle phase de la lutte anti-Jovenel Moïse, selon les constats, au moins cinq personnes sont blessées par balle. Ces incidents sont survenus au cours d'interventions policières. Présentement, les blindés noirs, symbole de répression,  deviennent des bêtes noires pour les citoyens qui fréquentent le bas de la ville. Ces derniers craignent des échanges entre les forces de l’ordre et les militants armés.

Parallèlement, les actes d’insécurité tendent à refaire surface dans la ville. Des cas de vol à la tire et à main armée sont rapportés. Ce vendredi matin, des individus armés non identifiés ont blessé par balle un citoyen dans les environs de Trou-Sable.


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