À la veille du mouvement de protestation annoncé pour le 5 décembre 2019, le parquet près le tribunal civil des Gonaïves a émis plus d’une vingtaine de mandats d’amener contre des militants de Descahos et de Raboteau, accusés de troubles à l’ordre public. Les concernés, notamment ceux de l’opposition radicale, ont dénoncé cette mesure. Ces derniers disent l’assimiler à une stratégie visant à éteindre le flambeau de la mobilisation, ce qui, à leurs yeux, est impossible.
Selon le chef du parquet, Me Sérard Gasius, cette disposition concerne les militants qui détiendraient des armes illégales et qui seraient de connivence avec l’opposant Arnel Bélizaire, incarcéré pour complot contre la sûreté de l’État. Ce prévenu que le parquetier qualifie de « terroriste » aurait distribué des armes de guerre aux insurgés de Raboteau, lors de sa visite le 28 novembre écoulé. « Arnel est le chef du gang, a-t-il déclaré. Après son arrestation, ses alliés doivent rendre des comptes à la justice. » Il exhorte la police à appréhender les suspects sans toutefois révéler leurs noms. Par inadvertance, il a cité néanmoins Raphaël Clavanet Marado, le stratège de l’opposition radicale.
Depuis lundi, des agents de la Brigade d’opération et d’intervention départementale (BOID) sont remarqués dans les rues de la cité de l’Indépendance. D’autres unités d’élite de la police, dont la SWAT Team, arriveront sous peu, a indiqué le commissaire. Au péril de sa vie, il s’est dit prêt à pacifier la ville qui, depuis plusieurs mois, est en proie à l’insécurité. « Nous sommes déterminé à rétablir l’ordre dans la juridiction », a-t-il ajouté d’un ton ferme. Si les concernés acceptent de collaborer, a renchéri le commissaire, ils ne seront plus poursuivis.
Le porte-parole de Ayiti an aksyon (AAA) et chef de file de l’insurrection, Fritz Désir, a minimisé les mandats. La décision du parquet, a-t-il souligné, est un moyen d’intimider ses camarades de lutte qui n’entendent pas lâcher prise. Selon l’homme politique, aucun acte de répression ne peut arrêter la machine de la mobilisation.
Pour sa part, Jécozias Pierre, leader de la Force d’opposition d’Ennery (FOPE), a demandé aux autorités judiciaires de se ressaisir. L’instrumentalisation de la justice et de la police, a-t-il expliqué, est un signe de faiblesse qui confirme la fin de Jovenel Moïse. Le militant invite la population à maintenir la pression sans relâche. « Il n’y a aucune possibilité de cohabiter avec Jovenel Moïse. Coûte que coûte, il doit partir pour libérer le pays », a conclu M. Pierre.
En raison des mouvements de protestation, le centre-ville des Gonaïves est enclavé. Les rues sont jonchées de pierres, de tréteaux et d’immondices. Le crépitement des armes paralyse toutes les activités dans cette zone commerciale. Les écoles n’ont pas pu non plus rouvrir leurs portes cette semaine. Les protestataires ont renouvelé leur volonté de boycotter les fêtes de fin d’année si le président reste accroché à son poste.
JC/Le Nouvelliste
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