À l’angle des rues Liberté et Toussaint Louverture,
centre-ville des Gonaïves, le mémorial de l’indépendance présente une vue
déplorable. Devant la façade de ce patrimoine national, un caniveau rempli
d’eaux puantes et de plastique accueille les rares visiteurs. La cour et la
salle d’exposition du site sont sales. Le lieu est désert.
Le 5 janvier 2020, le mémorial a été vandalisé par deux
jeunes. Au moyen d’un fusil de calibre 12, selon Mathieu Painvier, directeur
artistique du site, les suspects ont brisé les vitres de la porte d’entrée. «
Le juge de paix a retrouvé l’arme dans le jardin », a précisé M. Painvier. Il
déplore la lenteur des autorités dans le traitement de ce dossier. « Le
mémorial représente la fierté de tous les Noirs du monde, a rappelé le peintre.
Il mérite une attention particulière. » Une fois pour toutes, M. Painvier
espère que des dispositions seront prises pour combattre le sabotage des
patrimoines matériels.
À l’intérieur du monument, le décor laisse à désirer. Des
encadrements sont délabrés. Des œuvres d’art sont recouvertes de poussière.
N’en parlons pas du sous-sol où la poussière est amassée. La ménagère serait en
grève depuis plusieurs mois pour exiger le paiement de ses arriérés de salaire.
« C’est écœurant de laisser le mémorial dans un état aussi critique », a
tempête Mathieu, qui s’occupe du site depuis 2016. En signe de protestation,
depuis environ deux mois, il décide de prendre ses distances. « Le mémorial est
un symbole. Le banaliser, c’est piétiner la mémoire de nos ancêtres », a
tranché l’opérateur culturel. Il invite l’administration communale à assumer sa
responsabilité.
Entre 2016, date de sa réouverture au grand public, et début
2018, le mémorial était le site le plus visité de la ville. Durant cette
période florissante, se rappelle Mathieu Painvier, le monument était un point
de jonction entre les différentes couches sociales. À longueur de journée, des
délégations d’élèves, d’étudiants, de missionnaires entre autres le visitaient.
Avant la décadence, plus de trois mille personnes visitaient le mémorial,
d’après M. Mackendy Févrin, ancien administrateur du site. Celui-ci
souhaite une plus large promotion du mémorial à travers le pays.
Le mémorial a été construit en 1939 sous l’administration du
président Sténio Vincent, selon une inscription indiquée dans son enceinte. Il
n’est pas toujours resté sain et sauf durant les périodes de soulèvement
populaire. Décius Jeannite, un gardien ayant surveillé les lieux durant 37 ans,
a fait savoir que plusieurs pièces ont disparu. Il a notamment mentionné trois
tables en marbre et des statues des héros de l’indépendance.
JC/Le Nouvelliste
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